En effet, Claire est appuyée sur le mur, les bras autour du cou de Léon. J'ai bien l'impression qu'ils allaient s’embrasser. Sont-ils ensemble ? Non, je ne peux pas y croire, même si je m’attendais un peu, la façon dont ils étaient proches.

Tandis que je suis concentrée sur cette scène, je sens une main se poser sur mon épaule.

  • Kévin : Reena, vous ne venez pas danser ?
  • Moi : Non merci, je n’aime pas ça.
  • Kévin : Hé qu’est-ce que vous avez ? Vos yeux ! Vous pleurez ?
  • Moi : Non non, j’ai une poussière dans l’œil, j’allais justement aux toilettes pour voir ce que c’est.
  • Kévin : Ah ok ! Oh nos deux tourtereaux se sont enfin décidés !
  • Moi : Que voulez-vous dire ?
  • Kévin : Ca fait un moment que ça dure leur cinéma à ces deux là. Ils jouent au chat et à la souris. Ils ont enfin décidé d’avancer.
  • Moi : J’ai vraiment mal aux yeux, je vais y aller, veuillez m’excuser Kévin.
  • Kévin : Ah oui, pardon, allez-y.

Même si le couloir est assez large pour que je puisse passer, je m’arrête devant eux, et je parle assez fort.

  • Moi : Excusez-moi de vous déranger, j’aimerais juste passer.
  • Léon : Oh Reena ? Oui, pardon, bien sûr, je vous en prie.

Il s’écarte de Claire pour me laisser passer. D’habitude je parle assez doucement, mais là j’ai haussé le ton délibérément, justement pour qu’ils m’entendent bien. J’aimerai me retourner pour voir la tête de Léon, savoir sa réaction, mais je ne le fais pas.

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J’entre dans les toilettes et me mets à pleurer comme une malade. Mon maquillage coule sur mes joues avec les larmes. Je me mouche et m’essuie le visage, mais les larmes ne s’arrêtent pas. Qu’est-ce que je vais faire ? Si je reste trop longtemps ici, ils vont trouver ça bizarre. Je nettoie bien le visage, quand Léon entre. Il me regarde et s’approche de moi.

  • Léon : Je savais, vous n’aviez pas bonne mine toute à l’heure. Que s’est-il passé ?
  • Moi : Rien, rien du tout. J’ai juste eu une grosse poussière dans l’œil, ça me faisait mal.

Léon s’approche tellement de moi que je peux sentir sa respiration toute chaude, une sensation bien agréable.

  • Léon : Laissez-moi voir ça. Toute seule, vous n’y arriverez pas.
  • Moi : Non ça ira. Je l’ai enlevée !
  • Léon : Je ne crois pas, vous avez les yeux gonflés et bien rouges par rapport à toute l’heure. Laissez-moi voir ça, je vais vous dire si elle est encore là ou pas.

Maintenant il est tout près de moi, il se baisse jusqu’à mettre ses yeux à la hauteur des miens. Ses yeux fixent les miens, sans clignoter. D’un coup, j’ai très chaud, mon cœur bat tellement fort que je sens qu’il va exploser. Puis il se met à souffler sur mon œil droit (pour lequel j’ai prétendu avoir de la poussière).

  • Léon : Vous devez avoir raison, je ne vois rien.

Je m’éloigne de lui et le dos tourné.

  • Moi : Mr Kennedy, pouvez-vous me laisser ? S’il vous plaît ? Je vais me repoudrer un peu.
  • Léon : Oui, bien sûr. Je vais y aller.
  • Moi : Merci.
  • Léon : Je vous en prie.

Il part en direction de la sortie et tourne la poignée de la porte, mais il s’arrête un moment.

Léon : De près, vos yeux sont encore plus beaux Reena.

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Et il sort, sans attendre ma réponse. Pourquoi me torture-t-il ainsi ? Si seulement il pouvait se comporter indifféremment avec moi, ça arrangerait bien les choses. Au moins, je pourrai me mettre dans l’idée que je ne pourrai jamais l’avoir. Je pleure un bon coup et je l’oublie ! Merde ! Pourquoi est-il si adorable ? Pourquoi ?

Tout compte fait, je me lave le visage et le nettoie très soigneusement. Puis je me maquille assez légèrement, juste histoire de cacher quelques imperfections comme les cernes ou les poches. Puis je rejoins les autres.

  • Carlos : Eh bien, où étiez-vous ? On vous cherchait ?
  • Moi : J’étais partie aux toilettes.
  • Kévin : T’aurais pu me le demander le portos, je savais moi !
  • Carlos : Comment ça ? Tu savais ? Tu guettes les toilettes maintenant ?
  • Kévin : Mais non spèce d'enfoiré ! Je l’ai juste vue partir là bas toute à l’heure.
  • Chris : Bon vous deux, ça suffit ! Avec vos gamineries !
  • Kévin : Bien chef !

J’ai l’impression que Léon me fait la gueule. Je le trouve extrêmement silencieux. Et pourquoi d’ailleurs ? Ce n’est pas à lui, ce serait plutôt moi qui devrait lui en vouloir ! Il a les yeux fixés sur son verre.

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  • Kévin : Eh vous autres, vous ne savez pas ce que j’ai vu ?
  • Chris : Non, mais tu as l’intention de nous le dire, je suppose.
  • Kévin : J’ai vu notre cher ami Léon-
  • Claire : Kévin s’il te plaît.
  • Carlos : Bah quoi ? Qué passa ?
  • Claire : Ce n’est rien, encore des conneries, comme d’habitude !
  • Chris : Kennedy, qu’est-ce qu’il y a ?

Toujours le silence. Tout le monde se tourne vers Léon.

  • Chris : Hé Kennedy, je te cause là !
  • Léon : Pardon, Chris tu disais !
  • Chris : Qu’est-ce que tu as ? Tu es complètement ailleurs.
  • Léon : Je pensais à un truc. Pourquoi, quelque chose ne va pas ?
  • Billy : C’est plutôt à toi qu’on devrait demander ça. Tu es bizarre depuis toute à l’heure.
  • Rébecca : Tu sais bien que tu peux tout nous dire.
  • Chris : Bon sang, qu’est-ce qui se passe ici ?
  • Claire : Rien Chris ! Je t’ai dit, Kévin a trop bu !
  • Kévin : Hé oh, je ne suis pas encore saoul je vous signale.
  • Claire : Laisse tomber Chris.
  • Barry : Si Claire chérie dit ça, c’est qu’il n’y a rien. Oublie Redfield.
  • Chris : Mouais.
  • Barry : Je ne sais pas pour vous mais moi je commence à me faire vieux, je ne vais pas tarder à rentrer.
  • Chris : Tu as raison, on va faire pareil.

Tout le monde commence à partir. Chris et Claire rentrent ensemble. Billy et Rebecca également. Kévin, Carlos et Barry prennent chacun leur voiture.

  • Chris : Kennedy, tu déposes Reena ?
  • Léon : Oui oui, je m’en occupe.
  • Chris : Parfait. Bon vous autres, on se capte dans la semaine, com d’hab. Bonne soirée.
  • Léon : Bonne soirée à vous.

Puis Léon ouvre la portière du siège passager de son véhicule. J’attends un moment et finalement, je n’ai pas le choix, je monte dedans. La conduite se fait en silence, avec comme seul bruit de fond, toujours l’autoradio.

Léon n’a pas l’air dans son assiette et moi non plus, je ne suis pas trop d’humeur à parler.

  • Moi : Mr Kennedy.
  • Léon (toujours regardant la route) : Oui.
  • Moi : Vous m’en voulez ?
  • Léon : Non, pourquoi ? Devrais-je ?
  • Moi : Euh… je ne sais pas.
  • Léon : Vous avez fait quelque chose de mal ?
  • Moi : Je ne crois pas.
  • Léon : Alors, pourquoi vous culpabilisez-vous ?
  • Moi : Vous n’aviez pas l’air bien toute à l’heure ?
  • Léon : Pourquoi pensez-vous que ce serait à cause de vous ?
  • Moi : Non non, ce n’est pas ce que j’ai voulu dire.
  • Léon : Que vouliez-vous dire alors ?
  • Moi : Rien, laissez tomber. Vous allez bien ?
  • Léon : Si je dis oui, je vous mentirai.
  • Moi : Vous n’allez pas bien alors.
  • Léon : Peut-être.
  • Moi : Pourquoi ?
  • Léon : Des confusions, de l’ambiguïté dans ma tête.
  • Moi : J’espère que ce n’est pas trop grave.
  • Léon : Je l’espère aussi. Voilà nous sommes arrivés ! Demain je serai auprès de la famille Graham toute la journée. Je ne passerai donc pas au bureau.
  • Moi : Bien, je transmets.
  • Léon : Je l’ai dit pour vous aussi.
  • Moi : Oui bien sûr. Merci pour tout. J’ai passé une super soirée, vos amis sont vraiment sympas. J’espère que je serai à la hauteur de vos attentes.
  • Léon : Je ne doute pas un instant. Passez le bonjour de ma part à votre collègue.
  • Moi : Je n’y manquerai pas.
  • Léon : Bonne nuit Reena.
  • Moi : Bonne nuit Mr Kennedy.
  • Léon : Vous ne m’appellerez donc jamais Léon !
  • Moi : Il vaut mieux ainsi. Au revoir.

Je lui fais un petit sourire et retourne à mon appartement. Je n’ai pas entendu le bruit du démarrage du moteur. A peine rentrée chez moi, je regarde tout de suite par la fenêtre. Sa voiture est toujours là, il est toujours assis à l’intérieur. Je reste là pendant au moins un quart d’heure, il n’est toujours pas parti. Je fais ma toilette du soir et vais me coucher.

Le lendemain, mon premier réflexe est de venir voir à la fenêtre. Quel soulagement quand j’ai vu qu’il n’était plus là. J’ai passé une sale nuit, j’ai repensé à tout ce qui s’est passé hier soir. Je me posais la question de savoir si je devais encore l’aimer ou le laisser tomber. Je n’ai pas réussi à prendre une décision. Je vais laisser faire le destin.

Je me prépare donc tranquillement pour cette journée pénible de travail. Arrivée au bureau, je préviens Hunnigan que Léon sera de garde avec la famille Graham toute la journée. Elle a tiré une tronche de six pieds de long et alors, qu’est-ce que j’en ai à faire ? Je fais mon boulot et raconte ma soirée à Meg. Elle est déçue pour moi mais elle me console autant que possible pour que j’oublie cet incident. Je lui suis reconnaissante pour ça.

Ce midi, j’ai envie de manger tout et n’importe quoi ! Je déprime un peu, alors il faut que je mange !

  • Moi : Au fait, il te passe le bonjour.
  • Meg : Qui ça, "il" ?
  • Moi : Léon !
  • Meg : Il pense à moi ? C’est sympa. Mais au fait, maintenant que j’y pense, pourquoi il t’a présenté ses amis ?
  • Moi : Comme ça. Je n’en sais rien moi.
  • Meg : A mon avis, tu dois quand-même lui plaire, j’en suis sûre. Sinon je ne vois pas l’intérêt qu’il amène, toi, à une soirée avec ses amis.

Si seulement elle savait qu’il voulait me présenter aux membres de l’AUT, elle ne dirait pas ça. Enfin je ne dois lui parler de ça à aucun prétexte.

  • Moi : Oui mais bon, il était quand-même en train de bécoter avec l’une de ses amies.
  • Meg : C’était peut-être pour te rendre jalouse.
  • Moi : On a le droit de rêver hein ! Au moins, ça c’est gratuit !
  • Meg : Ouais et heureusement qu’on ne paie pas un royality à chaque fois qu'on pense à une personne.
  • Moi : C’est clair, sinon j’aurai plein de dettes envers Léon.

Et voilà, grâce à Meg, je retrouve le sourire. Heureusement qu’elle est là des fois. Ici à Raccoon, je ne connais personne, encore moins dans la ville où j’habite. Ma meilleure amie, Lola, est restée à Cool City, ma ville d'enfance. Je l’appelle régulièrement pour lui donner de mes nouvelles.

Quand je vais chez mes parents certains week-ends, on se fait des journées entre copines. Elle a quitté très tôt le domicile parental, lorsqu’elle est entrée à la fac. Elle avait pris une chambre d’étudiant à l’époque. Puis, quand elle a eu son master en journalisme, elle a eu tout de suite un poste de rédactrice dans un magazine local. Elle a pris un bel appart à Cool City. Elle est toujours célibataire et elle apprécie beaucoup cette liberté. Les mecs, elle trouve ça encombrant et ennuyeux. J’espère quand-même qu’elle trouvera chaussure à son pied un jour. Un gars qui la comprendrait assez et qui pourrait partager ses passions et accepter ses défauts. Je suis sûre qu’il existe, il faut juste qu’il montre le bout de son nez. Si ça se trouve, c’est déjà fait !

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Lola est une fille trop cool, on s’entend super bien toutes les deux. Je la connais depuis le collège et on a passé toutes nos années lycée et post-bac ensemble. On n’a pas eu le même cursus scolaire mais on était dans le même établissement à Cool City, le campus Pierre Durand, qui proposait beaucoup de formations. Elle préparait son Master en journalisme et moi un BTS assistant de direction.

Malheureusement, j’ai du aménager à Velvet City, une petite banlieue à côté de Raccoon City, pour être plus près de mon boulot, les locations étant trop chères à Raccoon même. Bien évidemment j’ai gardé contact avec Lola, c’est la fille la plus chouette que je connaisse.

Meg et moi finissons de manger et retournons au boulot. J’entends la sonnerie de message de mon portable. Je le sors et regarde le message.

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C’est sympa, il prend de mes nouvelles. Au vu de son message, il semble s’ennuyer là bas. Je vais lui répondre. « Bjr Mr Kennedy, merci pr votre msg, je vais mieux. Je vs comprends, vous devez vous ennuyer. Bon courage. »

Dés que je finis le message, je le montre à Meg, parce qu’elle veut absolument le voir.

  • Meg : Dis-donc, comment t’es rabat-joie toi ! Sois un peu plus gentille. Le pauvre, il s’emmerde et toi, c'est tout ce que tu trouves à lui dire !
  • Moi : Je ne sais pas moi quoi lui dire. Si je commence à exprimer ma joie, ce sera un roman !
  • Meg : Alors donne-moi ton portable.
  • Moi : Pourquoi faire ?
  • Meg : Tu vas voir !

Elle m’arrache le portable de la main et écrit un message.

  • Meg : Tiens regarde, un truc comme ça !

Je prends mon portable pour voir ce qu’elle a écrit cette vilaine.

Portable_Msg_Reena.jpg

  • Moi : T’es folle. Je ne vais pas lui envoyer ça.
  • Meg : C’est déjà fait !
  • Moi : Quoi ? Tu ne m’as pas fait ça, dis !
  • Meg : Bah si, de toute façon, c’est le cas ! Tu penses à lui nuit et jour. Tu me parles de lui à longueur de journée, il faut bien qu’il sache un de ces quatre.
  • Moi : Je vais te tuer Meg, je suis dans la merde, il va croire que je suis folle de lui !
  • Meg : Ce n’est pas faux en même temps !
  • Moi : Oh la la, j’ai honte ! Je suis fichue.
  • Meg : Mais non !

C’est la dernière fois que je lui passe mon portable. La honte la prochaine fois qu’on se verra, Léon et moi. Je vais me faire toute petite.

Cet après-midi, on a beaucoup de fichiers à vérifier et à classer. On ne pourra pas tout finir ce soir. Après une dure journée mais amusante, je rentre chez moi. Il fait de plus en plus froid, après tout c’est normal, on est en hiver.

Arrivée chez moi, pour me réchauffer, je me fais un bon thé à la menthe bien chaud, en attendant de préparer le dîner. Je regarde le courrier d’aujourd’hui, rien de bien intéressant, à part des factures d’électricité, du téléphone et des pubs !

Quoi encore un message ? Je regarde, encore mon chéri : « J’ai bcp aimé votre msg, ca me fait plaisir ke vs m’appeliez Leon. Vs semblez + détendu ds vos msg. Je ne serai pas là demain non plus, Mr Graham a rallongé son séjour. A bientôt peut-être au tél. Bonne soirée Reena. Bises. »

Il a mis « bises » à la fin, on ne s’est encore jamais fait de bises. Tout ça à cause, ou devrais-je dire, grâce à Meg. Je n’oserai jamais l’appeler « Léon ». Je me demande où tout ça me mènera.

Je prépare mon poulet au curry, avec du riz. C’est un plat relativement facile à faire, du moins le plus facile de chez nous, les Indiens.

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Ses messages m’ont rendue de bonne humeur. Même si je ne l’ai pas vu de la journée et qu’il ne sera pas là demain non plus, j’ai l’impression qu’il est toujours près de moi. Et puis j’ai sa photo sur moi dans mon porte-feuille.

Le jour suivant passe comme d’habitude, avec toujours autant de boulot. Par contre, je n’ai pas eu de message de Léon, il doit être débordé. Je ne vais pas le déranger.

On est déjà jeudi, alors que la semaine vient à peine de commencer. Le temps passe trop vite. J’arrive au bureau toute belle et fraîche, parce que mon chéri sera là au bureau, il m’a envoyé un texto tard dans la nuit. Alors je me devais bien ça.

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Je range un peu mon bureau, parce qu’il y a des piles de papiers partout. Je nettoie le moniteur et le clavier avec l’anti-poussière. J’ai même acheté un parfum d’ambiance au jasmin que je branche sur la prise secteur. Voilà, tout est prêt, Monsieur pourra venir quand il voudra. Je ferme à peine la bouche, que j’entends toquer et le vois entrer dans notre bureau.

Fin du Chapitre 7. A suivre...